Numéro 0 – Année Zéro
Première mise en mots pour une radicalité en Travail Social
La revue Articulation(s) portée par une équipe de chercheuses et de travailleurs et travailleuses du social a souhaité faire paraître un n°0 et relever le défi que pose la réflexion en Travail Social, critique et conscient des enjeux actuels. En effet, un appel à contribution «Tiers espace de la recherche action » est prévu depuis plusieurs semaines pour lancer le n°1. L’objectif de ce n°1 était de remettre en visibilité la réflexivité dans ses dimensions épistémologiques, méthodologiques et ses prolongements actionnables pour la recherche en travail social.
Pour autant, nous ne pouvions rester silencieuses dans ce moment inédit où le champ du travail social avec ses bénévoles, ses militant.es, ses chercheurs, chercheuses, ses professionnel.les se trouvaient, pour un certain nombre, en première ligne. La particularité de cette première ligne est qu’elle est invisible, n’étant ni des soignants, soignantes, ni des travailleurs ou travailleuses liés à des activités de première nécessité, comme le sont les caissières des supermarchés ou les éboueurs.
Cette épreuve collective du confinement a mis en exergue à la fin de la première quinzaine, les tensions sociales, économiques et politiques auxquelles se confrontent les travailleurs sociaux à longueur d’années.
Un premier texte de Dominique Paturel, chercheuse à l’UMR 951 Innovation et co-rédactrice en cheffe de la revue, vient rappeler ce qu’est le care quand on le voit essentiellement à partir du risque ; et pour cela, elle nous parle de l’essai de Joan Tronto paru en Le care ou le Risque.
Marie-Thérèse Savigny, éducatrice spécialisée, formatrice dans un Institut Régional du Travail Social, titulaire d’un doctorat en socio-anthropologie, rappelle que si la situation est inédite, les inégalités sociales sont là depuis longtemps. Elle évoque les outils du pouvoir pour dominer les corps mais aussi les esprits et interroge en particulier les formations en travail social.
Le troisième texte est celui de Marie-Pierre Auger, éducatrice spécialisée, cheffe de service en protection de l’enfance, et actuellement doctorante en sciences de l’éducation dans le cadre d’un CIFRE. Elle nous y explique que le confinement a engendré un inversement des dispositifs d’accompagnement des familles et de leurs enfants. Ces acteurs sont mis maintenant en situation d’assurer des missions jusque-là dévolues à certaines institutions (enseignement, aide, protection).
Marine Bruneau, éducatrice spécialisée de formation, formatrice et conférencière concernant l'égalité entre femmes et hommes et le travail social montre que ce moment où se médiatise la « chance » que ce moment complexe pourrait représenter pour les femmes en matière d’avancées vers l’égalité, est en réalité trompeur et qu’il ne faut s’y laisser prendre.
Puis Armelle S, doctorante en sciences de l’éducation et travailleuse sociale, fait état de certains des défis auxquels sont confronté.e.s les travailleur.se.s du social et les acteur.rice.s qu’ils accompagnement au sein des établissements qui accueillent des enfants au titre de la protection de l’enfance.
Laurent Barbe, psychosociologue, consultant spécialisé dans les politiques publiques d’action sociale et médico-sociale et enseignant insiste sur le rôle d’analyseur puissant de la pandémie comme révélateur de la porosité des frontières entre action sociale et protection de tous, renforçant les inégalités de situations et de territoires.
Le septième et dernier texte qui ferme ce n°0 est celui d’ Anna Rurka, maîtresse de conférences en sciences de l’éducation à l’Université Paris Nanterre (EA 1589), co-rédactrice en cheffe de la revue, invite le travail social à revenir à ses racines et à ses principes fondamentaux et fondateurs, c’est-à-dire à l’intention de transformer les réalités sociales, politiques et économiques.
L’ensemble de ce numéro 0 de l’An Zéro veut participer au renouveau par la reconnexion du travail social à ses origines dont l’existence était guidée par un objectif de transformation sociale collective : ce que nous appelons la radicalité du travail social.