Résumé

Article publié en 2017 dans le JOURNAL OF PROGRESSIVE HUMAN SERVICES2017, VOL. 28, NO. 2, 55–57, http://dx.doi.org/10.1080/10428232.2017.1292491© 2017 Taylor & Francis

Son autrice, Iris Cardenas, est à  Ecole du travail social, Université de Rutgers, New Brunswick, New Jersey, USA [ School of Social Work, Rutgers University, 536 George Street, New Brunswick, NJ 08901, USA ]

Traduction Anna Rurka

Mots-clés

Plan de l'article

Télécharger l'article

Les inégalités sociales restent un problème persistant dans notre pays. Malgré les tentatives de remédier à ce problème, les communautés continuent de subir des inégalités de manière disproportionnée. L'histoire de la discrimination et de l'oppression a joué un rôle essentiel dans le développement des groupes vulnérables qui, aujourd'hui, n'ont pas la possibilité de s'épanouir. En conséquence, nous, travailleuses et travailleurs sociaux, sommes confrontés au plus grand défi pour atteindre les valeurs et les objectifs fondamentaux de notre profession.

Nous vivons dans une époque où les besoins de la population sont non seulement extrêmement diversifiés, mais aussi où l'étendue et la cruauté de ces besoins ont dépassé l'urgence. Nous travaillons sans relâche pour répondre aux besoins essentiels, pour promouvoir l'autosuffisance et pour contribuer à la réussite des personnes accompagnées avec lesquels nous travaillons, directement ou indirectement. Toutefois, ces efforts sont souvent déployés à l'une des extrémités d'un continuum d'insuffisances, servant de pansement au problème. Les professionnel.les de notre secteur sont encouragéEs à éviter cela, en adoptant une perspective radicale dans leur pratique du travail social. En d'autres termes, les travailleuses et les travailleurs sociaux, quel que soit leur domaine de spécialisation, doivent prêter une attention particulière à l'impact des diverses forces extérieures sur nos publics, plutôt que de se concentrer uniquement sur l'individu.

Le travail social radical peut prendre de nombreuses formes. En fait, la littérature manque d'une définition précise de cette branche du travail social. Le défi semble résulter de la tentative d'établir un contraste distinctif entre les moyens utilisés pour parvenir à une société plus équitable dans laquelle les individus sont dignes et dignes d'intérêt. Néanmoins, je dirais que le travail social radical est l'utilisation tenace de l'analyse critique des événements historiques et de leur impact sur les populations vulnérables. C'est aussi l'examen continu des conséquences réelles et potentielles des politiques et des pratiques actuelles et la compréhension du fait que le travail social radical est un travail de longue haleine.

En fin de compte, être unE travailleuse ou travailleur social radical, c'est comprendre que le problème ne commence pas avec l'individu, lorsqu'il franchit la porte de votre service ; il s'agit plutôt de la manifestation de multiples échecs du système auxquels cette personne a été confrontée tout au long de sa vie. Le travail social radical croit fermement au changement structurel et s'efforce d'y parvenir. Ceci est particulièrement pertinent pour ma communauté actuelle, Newark, qui est considérée comme l'une des deux villes du New Jersey ayant les taux les plus élevés de concentration de la pauvreté et de la criminalité, ainsi que de faibles taux d'obtention d'un diplôme d'études secondaires, parmi d'autres signes précurseurs de déficits. Cette communauté a été au centre de multiples débats, réformes et contributions financières significatives qui n'ont abouti qu'à un sentiment désespéré de localité et à la perpétuation de la culture de la pauvreté.

Le concept de culture de la pauvreté et l'hypothèse de l'autosuffisance, comme l'explique David Troutt (2013), renvoient à l'idée que les pauvres se comportent d'une manière qui les empêche d'atteindre l'autosuffisance. En conséquence, les institutions véhiculent cette notion qui entrave encore davantage la mobilité sociale des individus. Les efforts concertés déployés pour aider ma communauté et ses habitants ont échoué de manière dévastatrice, à chaque fois, principalement en raison de l'absence d'une vision radicale. Dans une communauté minoritaire et à faibles revenus, les déficiences sont perçues comme des insuffisances individuelles, d'où les suppositions créées par le spectateur extérieur. D'un point de vue individuel, ce spectateur a le droit de se protéger contre ce qu'il perçoit comme une menace pour son sentiment de sécurité. Malheureusement, l'ensemble des idées qu'il croit favorables à sa survie sont basées sur des hypothèses biaisées et négligées concernant les personnes vivant dans la pauvreté.

De tout temps, les activités criminelles ont été attribuées aux zones à faibles revenus et appauvries, et les communautés en ont beaucoup souffert. Le message, véhiculé et renforcé par de nombreuses personnes, n'a pas seulement consisté à fuir ces endroits dangereux, mais aussi à éviter les personnes qui perpétuent ces crimes ou toute autre personne qui leur ressemble. Les implications du manque de ressources communautaires dans la vie des résidents tendent à être ignorées. Les effets des traumatismes et la normalisation de la violence sont utilisés comme des mécanismes d'adaptation et le dernier recours des individus pour survivre.

Le droit accordé aux spectateurs de faire des suppositions similaires à celles décrites ci-dessus n'est valable que s'il est fondé sur un manque de compréhension approfondie et une réticence à accepter les événements historiques tels qu'ils se sont réellement déroulés. C'est à ce moment-là que notre travail est impératif. Dans ma communauté, les travailleuses et travailleurs sociaux radicaux sont précieux pour déconstruire les hypothèses, évaluer et comprendre les diverses politiques qui ont fait des conditions actuelles une réalité. À cette fin, deux des principales forces qui ont participé à la détérioration de ma communauté, sont les implications du localisme et le délabrement du système scolaire.

En effet, les quartiers urbains et les quartiers à faibles revenus ne disposent pas d'une richesse suffisante pour accumuler les ressources de base qui permettraient à leurs habitants d'être compétitifs sur le marché de l'emploi et du logement. Pour ces communautés où le contrôle local est presque inexistant, l'impact du localisme fait toujours partie de la vie quotidienne. Je soutiens que si le localisme favorise l'autosuffisance dans les municipalités où les habitants sont suffisamment privilégiés pour s'y engager, l'absence de localisme nuit à l'autosuffisance et pourrait favoriser la dépendance.

Malgré l'absence d'une loi officielle créant le déséquilibre racial observé dans les écoles du New Jersey, la ségrégation dans les écoles est toujours reproduite par d'autres facteurs, tels que l'utilisation du localisme et les conséquences de l'écart de revenus. L'impact de la ségrégation de fait sur la fourniture d'une éducation complète et efficace est problématique. Comme les études montrent qu'il existe un lien étroit entre les écoles ségréguées et les mauvais résultats, il s'agit là d'un autre domaine d'intervention du travail social. Pour aggraver encore la situation, l'obstacle que cette ségrégation de fait crée en exposant les étudiants à un environnement socio-économique diversifié et racialement équilibré est préoccupant. Cela ne concerne pas seulement les écoles ségréguées dans les communautés urbaines à faibles revenus, mais aussi les quartiers où la ségrégation inverse a lieu. L'incapacité des élèves à faire partie d'une atmosphère diversifiée va au-delà des gains éducatifs. Les élèves sont privés de la possibilité de devenir des individus socialement compétents. Cette capacité est essentielle à la croissance interne dont les élèves ont besoin pour réussir plus tard dans la vie et pour interagir avec tous les membres de la société de manière productive.

Ainsi, le travail d'un travailleur social radical va au-delà du problème évident, de l'incapacité à payer le loyer ou la nourriture, des habitudes malsaines des individus et des mauvais résultats scolaires, pour analyser les forces qui facilitent la situation actuelle des communautés. En ignorant ces forces extérieures, nous contribuons à perpétuer l'inégalité et l'injustice sociale. En assumant le rôle de travailleuse et des travailleurs sociaux de première ligne et en tentant aveuglément d'aider un client d'un point de vue individuel sans analyser le contexte structurel, nous ne respectons pas nos valeurs fondamentales. Nous sommes tout aussi responsables de promouvoir les changements nécessaires pour que nos populations ne continuent pas à souffrir de forces qui échappent à leur contrôle.

Bibliographie

Troutt, D. D. (2013). The price of paradise: The costs of inequality and a vision for a more   equitable America. New York, NY: New York University Press.

Du même auteur

Tous les articles

Aucune autre publication à afficher.