N°1 / Vers le travail social radical

Travail de la biffe et travail social : retour d’expérience

Morgane Bechennec

Résumé

J’ai croisé à différents moments de mon parcours professionnel des personnes pratiquant « la biffe ». Je tente dans ce texte de relater comment cette activité a pu être prise en compte ou non dans les missions de travail social que j’exerçais. Il s’agit d’un point de vue situé, construit autour de ma pratique, des valeurs et de ma vision du travail social. Les observations que j’y fais n’engage que moi.

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La découverte

Lorsque l’on m’a parlé pour la première fois de la biffe comme activité principale, j’étais en poste dans une mission expérimentale de maraude autour du périphérique parisien. Expérimentale parce que financée à 100% par des fonds privés afin de faire un diagnostic auprès des habitants du périphérique parisien, jusque-là sous les radars des maraudes d’intervention sociale. 

J’avais auparavant travaillé au sein de maraude d’intervention sociale parisienne. Quelques personnes revendaient des objets de seconde main devant le centre Pompidou. Nous rencontrions certaines d’entre elles lors des maraudes. Cette activité était un prétexte à la discussion, à la création du lien. L’activité économique, comme la manche ou des petits services rendus à des commerçants, n’était pas prise en compte dans l’accompagnement social que nous proposions qui consistait à ouvrir des droits sociaux et à demander des mises à l’abri. Ces activités informelles étaient invisibles pour les travailleurs sociaux et la mission de l’intervention de l’association comme des leviers à un accompagnement potentiel. Le travail social était construit autour d’une « réduction des risques » de la vie à la rue via des activités d’aller-vers et une gestion de l’attente liée à la pénurie de places de mise à l’abri adaptées pour les personnes. 

La mission expérimentale de maraude périphérique a été construite autour du constat que les personnes vivant aux abords du périphérique construisaient leurs propres habitations ; et de l’hypothèse qu’elles seraient donc plus en capacité d’accéder à un logement autonome. La philosophie qu’entourait cette mission était de partir des demandes des personnes pour construire, avec les volontaires, des sorties de rue adaptées à leurs envies. Cette philosophie d’action supposait de ne pas s’arrêter au simple accès au logement social et d’être innovant dans la construction de sorties de rue, alternatives. Cette démarche et la liberté d’action dues au financement privé nous ont permis, à mon collègue et moi, d’avoir le temps de la rencontre et de ne pas être dans du « faire. »  

Ainsi, les personnes que nous rencontrions avaient, pour une majorité, construit leur habitation. Ce territoire, éloigné de la ville, des commerces, permettait une certaine tranquillité (si on oublie le bruit de la circulation et la pollution) à ces habitants. Moins sujets aux évictions, ils pouvaient s’installer, habiter dans un endroit plutôt sécurisé. 

Nous avons alors rencontré plusieurs personnes faisant « la biffe », cette activité de récupération-revente de matériaux et objets de seconde main. Avoir un lieu fixe, avec un espace de stockage, leur permettait de développer cette activité économique de manière régulière. Au fil des discussions; certains d’entre eux nous ont parlé de la difficulté de vendre sur des marchés informels, à cause de la répression policière parfois violente. D’autres nous ont parlé de marchés formels, organisés par la mairie à porte de Vanves et par une association à Montreuil. Nous nous y sommes rendus afin de comprendre le mode de fonctionnement de ces marchés. Par la suite, nous avons pu orienter certaines personnes vers ces marchés formels afin qu’elles bénéficient d’un cadre sécurisé pour exercer cette activité de récupération-revente. 

Cette activité peut être chronophage puisqu’elle nécessite des temps de travail décalés (tôt le matin, en soirée) pour récupérer les objets ou matériaux dans la rue, les poubelles. Nous nous sommes donc adaptés pour fixer des rendez-vous en fonction de leurs disponibilités. Le travail de proximité que l’on effectuait permettait cette flexibilité. Et puis, nous étions d’une certaine manière d’égale à égale, elle travaillait, je travaillais, nous avions tout deux des emplois du temps à faire coïncider. 

De même, j’ai pu constater que les revenus dégagés de cette activité dite informelle rendaient les personnes moins dépendantes aux aides sociales, aux distributions alimentaires. Ils leur permettaient d’élever leur niveau de vie, certes encore très précaire. Elle leur permettait d’avoir plus de choix alimentaire et vestimentaire. Ainsi, les orientations que l’on pouvait faire (aide financière, orientation vers des vestiaires, des aides alimentaires) venaient en complément de cette économie. Il en résulte que les personnes se trouvaient moins dépendantes des aides et des travailleurs sociaux. Nous avions moins à gérer d’urgences alimentaires et financières et pouvions nous concentrer sur les démarches d’accès aux droits. 

Pour autant, l’activité de « biffe » n’était pas prise en compte lors des projets de sortie de rue. En effet, informelle, cette activité ne permet pas d’y attacher des droits permettant la constitution d’un dossier d’accès au logement (fiche de paie, contrat de travail, sécurité sociale, prime d’activité délivrée par la CAF en complément de ressource). La formalisation de l’activité par la création d’une auto-entreprise ou d’un autre statut n’a jamais été évoquée, ni par nous, ni par eux. 

 

Au cœur d’un marché des biffins

C’est lors d’un poste de travailleuse sociale au sein d’un marché formel de récupérateurs-vendeurs que j’ai pu mieux comprendre qui étaient « les biffins », leurs histoires, leurs luttes et leurs difficultés pour se construire une place dans un espace socio-économique dont ils étaient exclus. 

Ce marché, géré par une association d’intervention sociale et financé entièrement par une mairie est né d’une lutte. Un mouvement de revendications de biffins, de sympathisants et d’habitants du quartier s’était créée à la suite d’une répression policière de plus en plus fréquente et de plus en plus violente. Ce bras de fer de trois ans avec la Mairie avait abouti à la création d’un « marché formel » de 100 places, sous un pont, sur trois jours où les biffins étaient autorisés à vendre leurs marchandises sans crainte d’une verbalisation ou d’une répression.  La gestion de ce marché n’a pas été confiée à l’association créée à la suite de ce mouvement de revendication, qui souhaitait une auto-gestion du marché. Elle a été confiée à une association d’action sociale. Ainsi, des postes d’agents d’accueil et de sécurité, de travailleurs sociaux et de chef de service ont été créés. Il en a résulté des tensions entre la Mairie, les travailleurs sociaux et les biffins. L’écart entre ce qui était défendu et l’assignation au statut de "bénéficiaire" d’aide sociale a généré des incompréhensions (Duclos, 2018). 

Lorsque je prends mon poste, le marché a 10 ans d’existence et compte près de 270 adhérents. Les tensions présentes lors de la constitution du marché formel sont encore présentes dans les paroles des salariés et des biffins les plus anciens. Il y a des tensions entre « les anciens » et « les nouveaux », entre « les anciens » et les salariés, entre « les encartés» et « la sauvette ».  Dès mon arrivée, lors de mon premier jour au Carré, on m’a interpellée sur tel ou tel sujet polémique. L’équipe salariée en a fait de même. De vieux litiges dont personne ne sait plus très bien où cela a commencé. Ça m’a frappée. En même temps de l’accueil chaleureux qu’on me réservait, des plaisanteries, le marché me paraissait un sacré sac de nœud. 

L’ambivalence du projet, qui a oscillé entre une volonté d’insertion d’une part et une demande d’auto-détermination d’autre part, se ressent encore dans la pratique quotidienne et contribue à ces tensions toujours flottantes. En effet, la mobilisation des biffins, la création de cette identité au moment de la lutte, s’est construite en s’opposant au statut « d’assisté ». Ils travaillaient, demandaient un droit à la dignité, d’être vendeurs, puis biffins. Ainsi, ils s’autonomisaient des circuits d’assistance, des proches aidants. Ils n’étaient pas juste des acteurs passifs, ils participaient à la société. Une autonomie, certes conditionnée, mais qui permet une liberté, vis-à-vis des patrons, des hommes pour les femmes et des circuits d’assistances pour tous et toutes. De l’autre côté, vu de l’extérieur, c’est la pauvreté qui saute aux yeux, pas le travail, l’activité de récupération- revente s’apparente aux « marchés de la misère » comme évoqué dans l’article de 20minutes écrit par Pauline Théveniaud en2010. Le stigmate colle à la peau. C’est pourquoi, lors de son officialisation, il s’agissait pour la municipalité de gérer cet endroit, d’insérer ces pauvres pour que cette activité prenne fin petit à petit. Seulement, ce projet ambitieux ne s’est jamais réalisé. Au contraire, de plus en plus de personnes investissent ces abords pour vendre « à la sauvette ». En milieu de journée, les trottoirs autour du marché sont noirs de monde. Des centaines de personnes viennent vendre à la sauvette, le marché ne pouvant pas répondre à toute cette demande.

Ce marché formel est conçu comme un dispositif d’action sociale construit autour de trois missions principales. La première est la gestion du marché et de l’espace public. Cette mission consiste en une série de tâches administratives et organisationnelles comme l’examen des dossiers d’admission, l’attribution des places, le contrôle des marchandises vendues et la médiation au sein de l’espace public dédié au marché. Le second volet est la proposition d’un accompagnement social et professionnel aux personnes volontaires autour des problématiques de logement, de santé, d’accès aux droits, à la formation et à l’emploi. Enfin, l’intégration dans la vie du quartier et la création de lien social autour des biffins, est le volet le moins investi par l’équipe, et par les biffins. Le bureau de l’équipe se trouve dans un bungalow de chantier à l’entrée du marché. Lorsque j’y travaillais, nous étions quatre salariés permanents présents par jour d’ouverture. Un intérimaire venait en renfort certains week-end.

 

Entre contrôle et prestation de service

La première mission est sans doute la plus ambivalente et celle qui met le plus en difficulté les salariés. 

En effet, l’espace du marché est un espace public en dehors des heures d’ouverture. Il s’agit de deux larges trottoirs se trouvant de chaque côté d’une voie de circulation, sous un pont du périphérique. L’endroit se trouve à une porte de Paris, aux abords d’un marché aux puces. La présence de trafic en tout genre engendre parfois des actes de violences. Il y a énormément de passage durant les jours d’ouverture du marché. Parfois, l’ambiance peut être électrique. En dehors de ces horaires, le pont est investi, servant régulièrement d’abris à des personnes sans domicile, et de lieu de vente informelle pour les biffins non encartés. Ces derniers sont priés de s’en aller par les agents de la Mairie afin que le marché s’installe trois jours par semaine entre 8h et 18h.

La gestion de l’espace est déléguée en partie à l’association et donc à l’équipe. Ils doivent, entre autres, contrôler que la marchandise soit conforme à la charte du marché. Il est interdit de vendre des armes, de la nourriture, des produits neufs, de l’alcool et des cigarettes. Cette charte permet au marché d’être en conformité avec la législation et ainsi d’être légale. La configuration des lieux et de l’équipe rend quasiment impossible une présence salariée constante sur le marché. Ainsi, le contrôle des produits vendus ressemble plus au "jeu du chat et de la souris" qu’à une véritable appropriation de ces règles et de ces enjeux par les vendeurs. C’est un point de tensions entre « les anciens » et les nouveaux. Ces derniers, n’ayant pas participé à la lutte, utilise le marché comme un espace de vente, une offre sur le territoire. Certains revendent des marchandises de contrefaçon, "tombées du camion" dès que l’équipe a le dos tourné. Cette situation crée un fort sentiment de frustration chez « les anciens », qui, malgré leur lutte, ont dû se plier aux règles du marché, décidées par l’association. Totalement dépossédés d’un pouvoir de décision sur la gestion du marché, ils pointent la responsabilité sur l’équipe de salarié.es, clairement en sous-effectif, qui n’arrive pas à remplir pleinement cette mission de gestion et de contrôle.

De même, la centralisation de l’organisation du marché par l’équipe salariée la met dans une position constante de négociation et de médiation. Ainsi, c’est vers elle que vont se tourner les adhérents lors d’un problème avec un voisin de place, un litige avec un client, un changement de jour de vente, une demande de matériel (bâche, barnum), une lumière qui ne fonctionne pas sous le pont, le manque de toilettes publiques. La majorité des conflits quotidiens, d’arrangements à trouver, passent par les professionnels. Ainsi, les outils organisationnels construits par l’équipe sont devenus complexes, des procédures se rajoutent afin d’essayer d’être le plus équitable possible et laissent finalement peu de place à la flexibilité et à l’individualisation des demandes. Le rapport des adhérents à l’équipe salariée s’assimile à une relation de service. Leur demandant d’être garant de tout, des litiges à la maintenance de l’espace public du marché. Cette mission n’entraîne pas beaucoup de reconnaissance de la part des biffins pour le travail de l’équipe salariée, dans le contrôle constant. 

L’autre ambivalence de cette mission tient à l’existence même du marché formel. Autour, les personnes effectuant la même activité mais n’ayant pas de place, sont considérées par les forces de l’ordre dans l’illégalité. Ils sont près de 1000 personnes chaque jour à venir vendre de manière informelle alors que le marché formel ne comprend que 100 places (Guillou, 2020). Elles sont systématiquement chassées, souvent violemment, parfois gazées. Cette mise en concurrence d’un public pourtant similaire met en lumière la schizophrénie du projet. Il est de fait sous-dimensionné par rapport à la réalité qu’il souhaite encadrer. Les « encartés » se plaignent de « la sauvette » qui leur font concurrence, qui font venir la police qui gaze sans distinction, leur confisque leurs affaires. Cette situation est celle qui m’a le plus interpellée. En effet, en plus de la violence symbolique et parfois physique des interventions policières, le projet même du marché me posait question. La population, des deux côtés de la barrière, est la même, même situation de pauvreté qui les emmène à vendre aux portes de Paris des objets de récupération. Au sein du service, il n’y avait pas d’action de plaidoyer engagée afin de témoigner de cette situation. En discutant avec mes collègues, certains était désillusionnés, comme s’il n’y avait aucune possibilité de changement. Cette situation était devenue routinière. Un sentiment d’impuissance avait envahi la plupart de mes collègues. Ce sentiment, souvent présent dans la bouche des travailleurs sociaux, est le résultat d’une contradiction forte entre une commande publique qui est d’insérer les personnes et les dispositions législatives qui excluent certaines personnes de l’accès aux droits. Dans le cas du marché formel, l’équipe salariée se retrouve dans l’impossibilité d’agir, incapable de répondre à la commande institutionnelle et simple observatrice du vécu réel des personnes, sans vraiment de capacité d’action. 

 

Entre réalité vécue et dispositif

d’action sociale

L’autre ambivalence tient dans la construction de la mission d’accompagnement social et professionnel. En effet, le marché formel était conçu comme un dispositif d’insertion duquel les adhérents allaient sortir après avoir pu être accompagnés sur le volet professionnel et social. Cet accompagnement peut améliorer des situations de vie en permettant aux personnes d’accéder à leurs droits (demande de régularisation, reconnaissance MDPH, apurement d’une dette locative) et à un travail plus stable et durable. Pour autant, la majorité des adhérents sont des personnes avec de faibles qualifications. Le contexte économique global ne leur permet pas d’accéder à un niveau de vie qui ferait qu’ils arrêteraient la biffe. En effet, certaines personnes présentes au marché n’avaient pas de difficulté d’accès aux droits (Bazin, Rullac, 2012). Elles étaient pauvres, à cause de l’organisation du marché du travail, de la pénurie de logement très sociaux disponibles en Île de France, des minimas sociaux ne protégeant pas de la pauvreté, mais tous leurs droits étaient ouverts. Cette activité reste pour une partie d’entre eux, insérés sur le marché du travail ou à la retraite, un complément de revenu nécessaire. Pour d’autres, dans des situations administratives ne leur permettant pas un accès au travail formel, elle reste une activité principale. Lorsque l’on connaît les différentes lois qui durcissent l’accès à un titre de séjour, la biffe n’est pas près de s’arrêter (Gitsi, 2016). 

De plus, la philosophie du projet qui souhaitait encadrer la biffe pour la résorber ne prend pas en compte le vécu des biffins qui trouvent dans ces jours de marché bien plus qu’une activité économique. En effet, en dehors du travail, elle est aussi une activité socialisatrice. Le marché est un lieu d’échange, de discussion, d’entraide. Il permet parfois d’oublier un temps ces réalités de vie, de rigoler, de trouver de l’entraide et de la solidarité. C’est, de fait, une activité leur permettant de lutter contre la pauvreté là où les politiques publiques montrent leurs limites. Elle est un élément constitutif de leur vie, permettant de retourner un temps le stigmate, d’être actif dans la cité, pour la société. 

Cette réalité est apparue de plein fouet à nos visages lors du premier confinement. Énormément de personnes se sont retrouvées sans rien, du jour au lendemain. Plus d’argent en poche pour acheter de la nourriture, des dettes qui s’accumulent et aucun levier afin de demander une aide globale en lien avec l’arrêt de ce travail, qui n’est pas considéré comme tel. Pour les personnes relevant du droit commun, des aides sociales du département ont pu être mobilisées au compte-goutte. Mais pour toutes les personnes sans domiciliation et sans régularisation, leurs situations sont devenues critiques. La majorité d’entre eux n’était pas habituée à solliciter de l’aide alimentaire. Celle-ci, d’ailleurs, n’est pas construite pour subvenir à tous les besoins. Les colis alimentaires ne permettent pas de manger trois repas par jour, il manque de la viande, du poisson, des légumes. Les personnes qui étaient en sous location se sont retrouvées avec la crainte de se retrouver à la rue, ce qui a parfois été le cas. Toutes les personnes qui louaient un espace de stockage (souvent les plus précaires, dormant en CHU, à la rue, en hôtel social) afin de pratiquer cette activité se sont retrouvées avec d’énormes dettes en regard de leurs ressources. Face à cette crise, l’association n’a pas pu apporter une protection particulière à cette situation exceptionnelle. En effet, bien que le marché formel ait permis une certaine reconnaissance de la biffe, elle n’a pas permis une reconnaissance de cette activité comme un travail à part entière. 

 

Un travail social paradoxal

Finalement, le travail social est lui-même ambivalent, oscillant selon les projets, les organisations qui les portent entre injonction à l’intégration et à l’autonomie et soutien au pouvoir d’agir des personnes. Pour autant, chaque action sociale se positionne vis-à-vis de l’existant, d’un manque, d’une invisibilisation de certaines réalités. Elle sous-tend un projet collectif puisqu’ ancré dans la société. Seulement, quand les projets d’action sociale perdent de vue la dimension politique de leur action, ils deviennent un pansement, sans réelle visée de transformation sociale sur la réalité sur laquelle ils agissent. Le projet de ce marché formel a mal débuté, il n’a pas été une construction collective avec toutes les parties prenantes. De fait, il s’est peu à peu transformé en une prestation de service. Il n’a pas su remplir ses missions puisque celles-ci n’ont pas été construites autour d’un diagnostic partagé. 

C’est pourquoi, il y a un vrai enjeu, pour l’action sociale et le travail social de soutenir ces activités pour ce qu’elles sont : une reprise en main d’espace socio-économique et politique par des personnes qui en étaient exclues, une lutte concrète et pragmatique contre la pauvreté, une autonomisation face à la dépendance aux seules aides publiques, un espace de solidarité et de convivialité. Il ne s’agit pas d’idéaliser cette activité. Cependant il est important pour le travail social de se poser la question de sa place et de son rôle face à ce type d’initiative afin de prendre en compte l’expérience des personnes qui vivent dans la pauvreté. Et comme le disait Akio Morita : « N’ayez pas peur de faire une erreur. Mais faites-en sorte de ne pas faire la même erreur deux fois ».

 

Bibliographie

Bazin, H. et Rullac, S. (2012) Etude qualitative portant sur les conditions de vie des biffins en Ile-de-France, commandée par l’Unité Société de la Direction du développement social, de la santé et de la démocratie régionale de la Région Ile-de-France [en ligne] 

http://rechercheaction.fr/ruesmarchandes/download/etude_sur_les_biffins_en_ile_de_france/Les-biffins-etude-qualitative.pdf

Duclos, M. (2018) : Du combat des biffins au Carré des biffins : de l'autonomie cultivée à la non-participation forcée », [en ligne] https://f-origin.hypotheses.org/wp-content/blogs.dir/1289/files/2018/09/Duclos-Session-3.pdf

Groupe d’Information et de Soutien des Immigré.es (GISTI) (2016) Précarisation du séjour, régression des droits, Penser l’immigration autrement. 

Guillou, B. (2020) Les biffins se rebiffent, Revue Projet, vol. 376, no. 3, 2020, pp. 20-23.

Theveniaud, Pauline (2010) Aux portes de Paris, le marché de la misère », 20 Minuteshttps://www.20minutes.fr/paris/403415-20100510-portes-paris-marche-misere[Publié le 10 Mai 2010, mis à jour le 12 Septembre 2014]

 

 

 

 

 

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Laurent Ott

Du point de vue d'un pédagogue social, ou d'un travailleur social, la question de "la biffe", de la revente, de la récupération et de l'économie alternative n'est pas un objet d'étude en tant que tel. Le pédagogue social et le travailleur social sont en première ligne pour observer l'implication des publics, des familles et tout particulièrement des enfants, dans les actions économiques liées à la revente.

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